Research | Open Access | Volume 8 (Suppl 11): Article 5 | Published: 16 Jun 2025
Kokou Ayamekpe1,&, Koboyo Liza Nadjir2, Amégnikpa Ablam Améyissa2, Rébecca Méyè Kindé3, Winigan Logtabe Koudéma4, Papissi Célestin Gnansa5, Péléké Mawaba Hilim6, P’lakim Wama Ouyengah2, Lochina Fétéké2 , Koumavi Didier Ekouevi1
1Centre de formation et de recherche en santé publique de Lomé, Lome, Togo, 2Centre national de transfusion sanguine de Lomé, Lome, Togo, 3African Field Epidemiology Network-Bureau du Togo, Lomé, Togo, 4Organisation Mondiale de la Santé, Bureau Togo, Lome, Togo, 5Centre des opérations d’urgence de santé publique. Lomé,Togo, 6USAID, Global Health Supply Chain, COVID Coordination, Lomé,Togo
&Corresponding author: Kokou Ayamekpe, Centre de formation et de recherche en santé Publique de Lomé, Lome, BP 917 Lomé, Email : akojacq@yahoo.fr, ORCID :https://orcid.org/0009-0003-6840-9013
Received: 13 Jan 2025, Accepted: 15 Jun 2025, Published: 16 Jun 2025
Domain: Field Epidemiology
Mots clés : Epidémiologie, hépatite B et C, primo-donneurs, Lomé (Togo)
©Kokou Ayamekpe et al Journal of Interventional Epidemiology and Public Health (ISSN: 2664-2824). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Kokou Ayamekpe et al Prévalence et facteurs associés aux hépatites virales B et C chez les primo-donneurs de sang au Centre National de Transfusion Sanguine de Lomé de 2020-2022. Journal of Interventional Epidemiology and Public Health. 2025;8 (Suppl 11):5. https://doi.org/10.37432/jieph-d-25-00022
Introduction: Les hépatites B (VHB) et C(VHC) sont deux maladies infectieuses virales graves et causes majeures de morbidité et de mortalité. Du fait leur transmission sanguine, les donneurs de sang sont soumis à la recherche de ces virus au Centre National de Transfusion Sanguine de Lomé (CNTS). Néanmoins le CNTS dispose de peu d’étude sur les cas rencontrés lors de ce dépistage. Cette étude a été initiée pour combler le vide d’information sur la prévalence et les facteurs associés aux hépatites B et C parmi les primo-donneurs de sang.
Méthodes:Nous avons réalisé une étude transversale, analytique du 1er décembre 2022 au 22 janvier 2023. Une extraction exhaustive de données secondaires a été réalisée à partir de la base de données du CNTS. Les données ont été analysées avec Epi info 7. Nous avons calculé la moyenne d’âge. Les proportions et les rapports de côte ajustés avec IC à 95% par régression logistique ont été utilisés pour déterminer les facteurs associés à la survenue de l’une des hépatites
Résultats:De 2020 à 2022, 579 cas ont été confirmés d’hépatites virales dont 212 VHB et 367 VHC chez 19081 primo-donneurs, soit une prévalence globale de 3 % (IC 95% [2,7 ;3,2]). L’âge moyen était de 30,4±9ans pour le VHB et de 28,4±7ans pour le VHC. La tranche d’âge de [20-30 ans] était plus représentée dans les 2 formes. Le sexe masculin (ORa=2,09 ;IC 95% [1,62 ;2,70]), l’âge >30 ans (ORa=1,76 ;IC 95% [1,40 ;2,21]), l’appartenance à la profession enseignante (ORa=2,39 ; IC 95%[1,58 ;3,63]) et élève ou étudiant (ORa=1,49 IC 95%[1,19 ;1,87]) prédisposent plus à la survenue d’une hépatite virale tandis que le statut matrimonial « Marié » (ORa=0,58 ;IC 95% [0,47 ;0,70]) protège contre les hépatites virale B et C parmi les primo-donneurs concernés.
Conclusion:Notre étude montre une prédominance du VHC chez les primo-donneurs de sexe masculin, célibataires. Le sexe masculin, l’âge >30 ans, le statut de célibataire, l’appartenance à la profession enseignante et élève/étudiant ont été retrouvés comme facteurs associés à la survenue d’une des hépatites. Un programme de prévention adéquat et une prise en charge appropriée des cas sont recommandés.
English Abstract
Introduction: Hepatitis B (HBV) and hepatitis C (HCV) are two serious viral infectious diseases and major causes of morbidity and mortality. Because they are transmitted through blood, blood donors are screened for these viruses at the National Blood Transfusion Centre in Lomé (CNTS). However, the CNTS has few studies on the cases encountered during this screening. This study was initiated to fill the information gap on the prevalence and factors associated with hepatitis B and C among first-time blood donors.
Methods: We conducted a cross-sectional, analytical study from 1 December 2022 to 22 January 2023. An exhaustive extraction of secondary data was carried out from the CNTS database. The data were analysed using Epi Info 7. We calculated the average age. Proportions and adjusted odds ratios with 95% CI by logistic regression were used to determine the factors associated with the occurrence of one of the hepatitis types.
Results: From 2020 to 2022, 579 cases of viral hepatitis were confirmed, including 212 HBV and 367 HCV cases among 19,081 first-time donors, representing an overall prevalence of 3% (95% CI: 2.7 – 3.2). The average age was 30.4±9 years for HBV and 28.4±7 years for HCV. The [20-30 year] age group was more represented in both forms. Male gender (aOR=2.09; 95% CI: 1.62 – 2.70), age >30 years (aOR=1.76; 95% CI:1.40 – 2.21), membership of the teaching profession (aOR=2.39; 95% CI:1.58 – 3.63) and being a pupil or student (aOR=1.49 95% CI: 1.19 – 1.87) predispose individuals to viral hepatitis, while being ‘married’ (aOR=0.58; 95% CI:0.47 – 0.70) protects against viral hepatitis B and C among first-time donors.
Conclusion: Our study shows a predominance of HCV among first-time male donors who are single. Male gender, age >30 years, single status, and membership in the teaching profession and pupil/student groups were found to be factors associated with the occurrence of hepatitis. An adequate prevention programme and appropriate case management are recommended.
Keywords: Epidemiology, hepatitis B and C, first-time donors, Lomé (Togo)
Les hépatites virales sont des maladies infectieuses universelles qui ont en commun une inflammation des cellules du foie liée à des virus. Ces virus sont de 5 ordres: le virus de l’hépatite A (VHA), de l’hépatite B (VHB), de l’hépatite C (VHC), de l’hépatite Delta (VHD) toujours associée au VHB et de l’hépatite E (VHE)[1].
Les données de la littérature montrent que seuls le VHB et le VHC peuvent évoluer vers la chronicité et entrainer des complications telles que la cirrhose du foie ou les carcinomes hépatocellulaires [2, 3]. Dans le monde en 2015, l’on estimait que 2 milliards de personnes (27% de la population mondiale) seraient porteuses de marqueurs sérologiques du virus de l´hépatique B et 257 millions vivaient avec une hépatite B chronique, avec un nombre de décès estimé à 887 000, principalement du fait de la cirrhose ou du carcinome hépatocellulaire[4]. La prévalence mondiale de l’hépatite B est passée de 5,4% en 2008 à 5,8% en 2020[5] alors que celle de l’hépatite C estimée à 3% en 2008 est passée à 4% [5,6]. Les données récentes publiées en 2022 par l’OMS renseignent qu’environ 254 millions de personnes vivaient avec une hépatite B chronique ; environ 1, 1million de décès ont été enregistrés principalement par cirrhose ou cancer du foie et que 58 millions d’individus sont porteurs chroniques de l’hépatite C avec 1, 5 million de nouvelles infections par an [7].Par son ampleur en termes de morbidité et de mortalité, les hépatite B et C constituent une véritable préoccupation sanitaire dans la mesure où elle apparaît comme une épidémie silencieuse dynamique, dès lors que la plupart des personnes contaminées par le VHB ignorent pendant longtemps leur infection et se trouvent ainsi exposées à un risque élevé de développer une maladie chronique grave du foie et peuvent transmettre sans le savoir l’infection à autrui. Elle constitue une lourde charge pour la santé publique et les populations comparable à celle posée par d’autres maladies transmissibles comme le VIH, la tuberculose ou le paludisme [4].
Une méta analyse a montré que la prévalence des hépatites B et C occultes sont élevées et variables selon les pays et les groupes de populations [8].
Les données épidémiologiques sur ces virus sont limitées dans les pays en développement, en particulier les pays de l’Afrique au Sud du Sahara dont le Togo, alors que ces pays font partie des zones de forte endémicité[9] pour l’infection chronique par le virus de l’hépatite B où entre 5 à 10% de la population est porteur chronique [10].En Gambie en 2014, une étude a montré que la prévalence de l’hépatite B est de 18,3% [11]. Au Ghana les prévalences des hépatites sont estimées à 5,06% pour le VHB et 0,93% pour le VHC en 2019[12]. Une étude au Bénin en 2019 dans la population générale a montré une prévalence de 6% pour l’hépatite B [13]. En Côte d’ivoire les études antérieures montrent une prévalence du VHB à 12% et VHC à 5% en 2015 [14].
Au Togo, une étude faite en 2011 a montré que la prévalence de l’hépatite B dans la ville de Lomé était de 16,36%[15]. Les deux virus ont une prévalence plus élevée chez les personnes vivant en concubinage et ceux ayant un niveau d’étude universitaire selon les études antérieures[15]. Pour mieux mener la riposte contre les hépatites B et C, le Togo s’est aligné sur la stratégie proposée par l’OMS. Cette stratégie met un accent particulier sur la détection précoce des cas associé à une sensibilisation accrue et la vaccination des personnes séronégatives afin de réduire la transmission dans les populations [16]. La vaccination contre l’hépatite B est disponible dans le pays. Depuis 2008, Il est gratuit dans la vaccination de routine pour les enfants de 0 à 24 mois (vaccin pentavalent). Les adultes devront se l’acheter. Les vaccins disponibles sont le Shanvac B et l’Euvax B. Les traitements de l’hépatite B et C sont disponibles au Togo et payants pour tout type de patients. Le ténofovir est le médicament généralement utilisé pour le VHB. Le risque de transmission du VHB et VHC est élevé chez les personnes en concubinage et lors des transfusions sanguines dans un contexte de pénurie fréquente des produits sanguins. Le Centre National de Transfusion Sanguine de Lomé (CNTS Lomé), centre de référence en matière de collecte, conservation et distribution du sang, joue un rôle important dans la détection précoce car le dépistage du VHB et VHC est systématique dans le bilan fait à tout donneur de sang afin de maintenir à un niveau élevé la sécurité transfusionnelle et réduire considérablement le risque de transmission par transfusion sanguine. Cette pratique de dépistage systématique permet d’assurer une qualité des poches de sang. Cependant le CNTS ne dispose pas d’études épidémiologiques sur les cas dépistés lors des séances de don de sang. Pour combler ce vide informatif, cette étude a été initiée pour décrire le profil épidémiologique de l’hépatite B et C parmi les primo-donneurs de sang au CNTS de Lomé et les facteurs qui y sont associés.
L’étude s’est déroulée dans la région sanitaire du Grand Lomé et le Centre National de Transfusion Sanguine a été le site de collecte de données. Nous avons procédé à une extraction des données secondaires de la base du CNTS. Il s’est agi une étude transversale, analytique réalisée du 1er décembre 2022 au 22 janvier 2023. Elle a porté sur les données des primo-donneurs de janvier 2020 à décembre 2022. Les variables étudiées étaient le sexe, le statut matrimonial, la profession, le résultat AgHBS, le résultat Ac HVC, l’âge et le résultat de la sérologie VIH.
Une personne est considérée comme positive à l’hépatite B ou C lorsque la base renseigne pour cette personne un résultat positif au test sérologique immunoabsorption enzymatique (ELISA) de recherche d’anticorps de surface du VHB (AgHBs) ou du VHC. Le test MONOLISA HBs Ag ULTRA de 4ème génération du fabricant BIORAD a été utilisé pour le diagnostic de l’hépatite B et pour l’hépatite C il s’est agi de INNOTEST HCV Ab IV du fabricant FUJIREBIO. L’algorithme de validation des poches passe par un interrogatoire qui élimine tout cas suspect ou ayant un risque dans les 6 derniers mois précédent le don. Des tests sérologiques (ELISA) de sensibilité élevée sont utilisés pour le contrôle qualité du sang prélevé et les poches de sang dont les tests sont positifs ont été détruits pour raison de sécurité transfusionnelle. Les seuils internationaux sont utilisés pour valider les tests d’une part et les résultats d’autre part.
Après obtention de la base de données, nous avons procédé à la vérification des données en éliminant les doublons, les données manquantes pour s’assurer de l’exhaustivité et de la cohérence des données. Les analyses ont été faites à l’aide du logiciel Epi info 7. Les proportions sont calculées avec leur intervalle de confiance à 95% pour les variables qualitatives, la moyenne ±Ecart type a été calculée pour l’âge. Pour la phase analytique, les odds ratio ont été calculés avec les Intervalle de Confiance (IC) au seuil d’erreur de 5%. Les variables pour lesquelles les associations étaient significatives au seuil de 20% en analyse bi-variée ont été intégrées dans un modèle de régression logistique par la procédure pas-à-pas descendante pour déterminer les facteurs associés. Les associations pour lesquelles l’intervalle de confiance ne contenait pas la valeur 1 et une valeur de p <0,05 ont été considérées comme statistiquement significatives. La colinéarité entre les variables explicatives et l’adéquation du modèle final ont été vérifiées par le test d’Hosmer-Lemeshow.
Considérations éthiques
Pour le respect de l’éthique, le présent protocole a été présenté et validé par le staff de formation en épidémiologie de terrain du niveau intermédiaire (Field Epidemiology Training Program) puis présenté au directeur du CNTS pour avis et autorisation écrite qu’il a donné sous le n°1450/2023/CNTS avant l’exploitation des données dans la base du CNTS. L’anonymat a été respecté. La base analysée ne contenait pas également le numéro d’identification des donneurs, les données sont saisies dans une base de données où les auteurs seuls ont accès. Nous avons signé également au CNTS un engagement de non-divulgation des données.
Au total, le CNTS a enregistré 19 081 primo-donneurs de sang durant les 3 années, soit 5852 primo-donneurs en 2020 (30,6%), 5436 (28,5%) en 2021 et 7793 (40,9%) en 2022. Des pics sont observés en février 2020, juin 2021 et Novembre 2022 (Figure 1).
Prévalence des hépatites virales chez les primo-donneurs de sang au CNTS
Sur les 19081 primo-donneurs enregistrés durant la période d’étude au CNTS de Lomé, on notait 579 cas confirmés d’hépatites virales B ou C soit (212 cas de VHB et 367 cas de VHC). La prévalence globale est de 3 % (IC 95% [2,7 ;3,2]) à raison de 1,1% (IC 95% ;[0,9 ;1,2)] pour le VHB et 1,9 % (IC 95%[1,7 ;2,0 ]) pour le VHC. Cette prévalence globale a varié de 3,5%, 3,9% et 2,0% respectivement en 2020, 2021 et 2022. Le VHC a prédominé en 2020 et 2022 avec des proportions respectives de 72,59% et 74,8% (Figure 2).
Caractéristiques socio-démographiques des cas.
Sexe et âge
Parmi les primo-donneurs positifs au VHB, 185 (87,3 %) étaient des hommes et pour le VHC 326 (88,8%) étaient hommes. L’âge moyen (années) des clients atteints du VHB était de 30,4 ±7 ans alors que celui de ceux atteints du VHC était de 28,4 ±6 ans. Quel que soit le type d’hépatite, on note que la tranche d’âge de [20-30 ans] était la plus représentée.
Situation matrimoniale
Pour les clients dépistés positifs au VHB, la situation matrimoniale a été renseignée chez 177cas. Il y avait 140 célibataires, soit 79%. Concernant les clients atteints du VHC, on notait 280 (82%) célibataires, sur les 342 clients chez qui la situation matrimoniale a été renseignée.
Profession
On note une prévalence plus élevée parmi les enseignants (7,1%), employés de bureau (6,6%) et force de l’ordre et de sécurité (5,6%).
Provenance
La prévalence des hépatites chez les primo-donneurs était de 3,7% pour le district de Golfe (388/10492) et de 2,3% pour le district de Agoe nyive(133/5729). La commune de Golfe 1 a eu la plus forte prévalence (14,2%).
Co infection hépatite -VIH
Parmi les 212 primo-donneurs positifs au VHB, 4 (1,8%) étaient infectés au VIH. Pour les 367 cas de VHC, 5 (1,3%) étaient infectés VIH.
Facteurs associés aux hépatites virales
Le tableau I (analyse bivariée), on note que le sexe masculin (ORb=2,17 IC 95%: [1,68 ;2,8]), l’âge > 30 ans (ORb=0,69 IC 95% [0,58 ;0,82]), la situation matrimoniale de célibataire (ORb=1,66 IC 95% [1,36 ;2,03]) et la profession d’enseignant (ORb=2,51 IC 95% [1,65 ;3,7]) étaient associés à la survenue de l’une des hépatites virales chez les primo-donneurs de sang.
En régression logistique dans le tableau II, on note que l’âge supérieur à 30 ans multiplie par 1,76 le risque de survenue d’une des hépatites (ORa=1,76 IC 95% [1,40 ;2,21]) tandis que le sexe masculin l’augmente de 2 par rapport au sexe féminin (ORa=2,09 IC 95% [1,62 ;2,70]). De même le fait d’appartenir aux professions « enseignante » (ORa=2,39 IC95% [1,58 ;3,63]), « Force de l’ordre et de sécurité » (ORa=2,19 IC 95% [1,01 ;4,78]), « Elève ou étudiants » (ORa=2,09 IC 95% [1,62 ;2,70]) et être célibataire (ORa=1,7 IC95% [1,41 ;2,02]) augmente le risque de survenue d’une hépatite indépendamment des autres professions.
Limites de notre étude
La faiblesse de l’étude se trouve dans le fait qu’elle n’ait concerné que les primo-donneurs et donc ne fournit pas d’information sur les anciens donneurs contrairement à certains des études faites en Afrique et dans le Monde. Une autre concerne le fait que les facteurs associés aux hépatites prévus dans le protocole pour être étudiés se sont limités aux facteurs sociodémographiques à cause des principes de contrôle qualité du CNTS qui n’autorisent pas le prélèvement du sang chez les personnes ayant eu des comportements à risque dans les 6 derniers mois. Enfin la non-réalisation de l’étude dans la population générale où la prévalence pourrait être différente de celle observée au CNTS compromet la possibilité de généralisation des résultats. Les interprétations faites de ces résultats seront limitées rien qu’aux primo-donneurs.
Discussion des différences importantes dans les résultats
La prévalence des hépatites dans notre échantillon était de 3% soit 1,1% pour le VHB et 1,9% pour le VHC. Zohoun et al. au Maroc en 2010 dans une étude sur la Séroprévalence du VHB et VHC chez les donneurs de sang au Centre de Transfusion Sanguine de l’Hôpital Militaire d’Instruction Mohammed V à Rabat Maroc ont retrouvé une prévalence de 0,8 % et 0,2 % respectivement pour le VHB et VHC [17].
La prévalence retrouvée dans notre étude est élevée que la leur, cela pourrait être due au fait que le vaccin contre l’hépatite B est introduite dans le Programme Elargi de Vaccination (PEV) en 2008 au Togo alors que le Maroc l’a introduit depuis 1999[18]. Aussi puisque leurs résultats portaient sur l’ensemble des donneurs (nouveaux et anciens) alors que les nôtres portaient sur les primo-donneurs. Nous pourrons poser l’hypothèse que les donneurs de sang à Rabat au Maroc sont mieux sensibilisés et pratiquent mieux les mesures de lutte contre les hépatites que ceux de Lomé (Togo).
Par contre dans la sous-région Ouest Africaine, Bawah et al en 2020 ont étudié la Séroprévalence de l’infection par l’hépatite B parmi une population de donneurs de sang dans le district de Kpandai au nord du Ghana portant sur les données de 2014 à 2018. Ils ont retrouvé pour VHB une prévalence de 8,1% [19] supérieur à la nôtre. Cette différence peut s’expliquer par la petitesse de leur échantillon (2802), 6 fois plus petite que notre taille. De même au Cameroun en 2013, une étude de Ankouane et al avait retrouvé une prévalence de 12,6% de VHB et 3,2% de VHC chez les donneurs de sang de l’hôpital central de Yaoundé [20]. Au Mali en 2019, une étude de Diarra et al a montré que les prévalences des VHB et de VHC au CNTS de Bamako étaient respectivement de 4,51% et de 0,77% chez les donneurs réguliers et respectivement de 8,18% et de 1,13% chez les nouveaux donneurs[21]
La prévalence de l’hépatite C est supérieure à celle de VHB dans notre échantillon. Bawah au Ghana [19] , Zohoun au Maroc [17], Motayo et al. [22] au Nigéria ont retrouvé un résultat contraire. Même dans la population générale à Lomé, la prévalence de l’hépatite B était supérieure à celle du VHC (16,36 % pour VHB contre 5,64% pour le VHC [15]. Cette différence observée peut être expliquée d’une part par le comportement sexuel à risque de la population jeune et adolescente, et d’autre part par le fait que dans la population générale, les jeunes pensent que la vaccination contre l’hépatite B peut protéger le VHC. Ce qui engendre une prise de risque élevée.
Il y a plus d’hommes atteints d’hépatites virales que de femme (quelques soit le type) chez les primo-donneurs dans notre échantillon. Ces résultats sont similaires à ceux de Bawah au Ghana [19], Motayo et al. au Nigéria [22] et peuvent être expliqués par le fait que dans notre échantillon de même que ceux des études précitées, les hommes étaient prédominants car ils avaient moins de période de non éligibilité pour le don de sang comparé aux femmes. En effet, pendant les périodes de grossesses et d’allaitement, les femmes ne sont pas éligibles à donner du sang.
Les tranches d’âge de [20-30ans[étaient plus représentée dans les 2 sexes et pour les 2 formes d’hépatites. Ces résultats sont identiques à ceux observés par N’Lankpé et al. au Ghana [23] dans une étude sur la séroépidémiologie des infections par les virus de l’hépatite B et C parmi les donneurs de sang du district de Saboba dans la région nord du Ghana en 2021. La prédominance juvénile pourrait non seulement s’expliquer par le fait que les activités sexuelles sont accrues à cette période et que beaucoup négligent les mesures de prévention mais également aux pratiques exposant les jeunes au sang contaminés tels que les pratiques d’injections ou de soins à risques, de transfusion de sang n’ayant pas fait objet de dépistage et de la consommation de drogues.
Les élèves et étudiants étaient beaucoup plus représentés parmi les primo-donneurs. Cela s’explique par le fait qu’ils sont plus intéressés à donner du sang pendant les campagnes de don de sang.
Le sexe masculin était un facteur qui multiplie le risque de survenue de l’une des hépatites virales dans notre étude. Nous expliquons ces résultats par le fait que les hommes sont plus susceptibles de donner du sang. Nkingueh Tazenkeng et al au Cameroun avaient aussi retrouvé le sexe masculin comme associé à la survenue de l’hépatite B[24]. Le statut de « célibataire » augmente le risque de survenue de l’une des hépatites. Ce résultat peut s’expliquer par le fait que les célibataires pourraient avoir plusieurs partenaires sexuels que les mariés et par conséquent courir plus de risque que les mariés. Kpossou Aboudou et al au Bénin avait également retrouvé dans une étude en population générale que le statut matrimonial était associé à la survenue de l’hépatite B [13].
Au terme de cette étude, il ressort que la prévalence des hépatites chez les primo-donneurs de sang au CNTS de Lomé est élevée et que le VHC circulait plus que le VHB. Cette maladie évolue sous un mode endémique chez les hommes célibataires dans les groupes professionnels d’enseignants, élèves ou étudiants, employés de bureau et Corps des forces de l’ordre et de sécurité. Le district sanitaire de Golfe était plus concerné et la commune majoritairement représentée était la commune de Golfe 1. Avoir un âge supérieur à 30ans, être célibataire, appartenir au sexe masculin et à la profession enseignante ou corps des forces de l’ordre, être élève ou étudiants exposent plus à l’infection aux hépatites virales B et C. Une éducation intensive ciblant les groupes exposés, un dépistage de masse, une vaccination des personnes séronégatives et une prise en charge adéquate des cas sont recommandées. Une autre étude dans la population générale pourra rechercher les facteurs comportementaux relatif à la prédominance du VHC afin d’orienter les plans de communications.
What is already known about the topic
What this study adds
Les auteurs tiennent à remercier les institutions suivantes : le programme de formation en épidémiologie de terrain du Togo (FETP), la direction régionale de la santé de la région du grand Lomé, le personnel du Centre National de Transfusion Sanguine et le ministère de la Santé du Togo.
KA a développé le protocole de l’étude, a effectué la collecte, le traitement et l’analyse des données, le développement et la révision des résultats et du manuscrit. Il a ensuite approuvé la version finale à publier. KLN a amélioré le protocole, a participé à la rédaction de la partie discussion. AAA a participé à l’extraction des données dans la base du CNTS, RMK a corrigé le protocole et le résumé, WLK a corrigé le protocole, PCG a corrigé le protocole, PMH a participé à l’analyse des données, PWO a extrait les données dans la base du CNTS, LF a jugé le travail lors de la cérémonie de graduation FETI I , KDE a corrigé la fiche d’enquête et a facilité l’accès aux données au CNTS.
Tableau 1 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022 (analyse bi variée).
Caractéristiques | Hépatite | Total N(%) | ORb | IC 95% | P-value | |
---|---|---|---|---|---|---|
Oui n(%) | Non n(%) | |||||
Age (années) | ||||||
>30 ans | 203(3,9) | 5040(96,1) | 5243(100) | 1,44 | 1,40-2,1 | 0,0000 |
≤30 ans | 376(2,7) | 13462(97,3) | 13833(100) | 1 | ||
Sexe | ||||||
Masculin | 511(3,4) | 14353(96,6) | 14864(100) | 2,17 | 1,68-2,8 | 0,0000 |
Féminin | 68(1,6) | 4149(98,4) | 4217(100) | 1 | ||
Profession | ||||||
Élève/étudiants | 311(3) | 9859(97) | 10170(100) | 1,04 | 0,86-1,2 | 0,2000 |
Autres professions | 268(3) | 8643(97) | 8911(100) | 1 | ||
Profession enseignante | ||||||
Oui | 27(7,1) | 353(92,9) | 380(100) | 2,51 | 1,65-3,70 | 0,0000 |
Non | 552(3) | 18149(97) | 18701(100) | 1 | ||
Force de l’Ordre et de Sécurité | ||||||
Oui | 7(5,7) | 116(94,3) | 123(100) | 1,93 | 0,90-4,17 | 0,0000 |
Non | 572(3) | 18386(97) | 18958(100) | 1 | ||
Situation matrimoniale | ||||||
Célibataires | 446(3,5) | 12372(96,5) | 12818(100) | 1,66 | 1,36-2,03 | 0,0000 |
Mariés | 133(2,1) | 6130(97,9) | 6263(100) | 1 |
Tableau 2 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022 (régression logistique).
Caractéristiques | OR ajusté | IC 95% | P-Value |
---|---|---|---|
Age | |||
>30 ans | 1,76 | 1,40-2,21 | 0,0000 |
≤30 ans | 1 | ||
Force de l’Ordre et de Sécurité | |||
Oui | 2,19 | 1,01-4,78 | 0,0481 |
Non | 1 | ||
Profession enseignante | |||
Oui | 2,39 | 1,58-3,63 | 0,0000 |
Non | 1 | ||
Sexe | |||
Masculin | 2,09 | 1,62-2,70 | 0,0000 |
Féminin | 1 | ||
Situation matrimoniale | |||
Célibataire | 1,7 | 1,41-2,02 | 0,0000 |
Marié | 1 | ||
Élève/Étudiant | |||
Oui | 1,49 | 1,19-1,87 | 0,0005 |
Non | 1 |
Tableau 3: Répartition des primo-donneurs positifs aux hépatites selon les professions au CNTS de Lomé de 2020 à 2022
Profession | Nombre de primo-donneurs | Nombre de cas d’hépatite (VHB+VHC) | Proportion (%) |
---|---|---|---|
Enseignants | 380 | 27 | 7,1 |
Employés de bureau | 1071 | 71 | 6,6 |
Force Ordre et de Sécurité | 123 | 7 | 5,6 |
Élèves | 4488 | 156 | 3,4 |
Professionnels de santé | 410 | 11 | 2,6 |
Artisans | 7301 | 144 | 1,9 |
Étudiants | 9348 | 163 | 1,7 |
Total | 19081 | 579 | 3 |
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Tableau 1 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022 (analyse bi variée).
Caractéristiques | Hépatite | Total N(%) | ORb | IC 95% | P-value | |
---|---|---|---|---|---|---|
Oui n(%) | Non n(%) | |||||
Age (années) | ||||||
>30 ans | 203(3,9) | 5040(96,1) | 5243(100) | 1,44 | 1,40-2,1 | 0,0000 |
≤30 ans | 376(2,7) | 13462(97,3) | 13833(100) | 1 | ||
Sexe | ||||||
Masculin | 511(3,4) | 14353(96,6) | 14864(100) | 2,17 | 1,68-2,8 | 0,0000 |
Féminin | 68(1,6) | 4149(98,4) | 4217(100) | 1 | ||
Profession | ||||||
Élève/étudiants | 311(3) | 9859(97) | 10170(100) | 1,04 | 0,86-1,2 | 0,2000 |
Autres professions | 268(3) | 8643(97) | 8911(100) | 1 | ||
Profession enseignante | ||||||
Oui | 27(7,1) | 353(92,9) | 380(100) | 2,51 | 1,65-3,70 | 0,0000 |
Non | 552(3) | 18149(97) | 18701(100) | 1 | ||
Force de l’Ordre et de Sécurité | ||||||
Oui | 7(5,7) | 116(94,3) | 123(100) | 1,93 | 0,90-4,17 | 0,0000 |
Non | 572(3) | 18386(97) | 18958(100) | 1 | ||
Situation matrimoniale | ||||||
Célibataires | 446(3,5) | 12372(96,5) | 12818(100) | 1,66 | 1,36-2,03 | 0,0000 |
Mariés | 133(2,1) | 6130(97,9) | 6263(100) | 1 |
Tableau 1 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022
Tableau 2 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022 (régression logistique).
Caractéristiques | OR ajusté | IC 95% | P-Value |
---|---|---|---|
Age | |||
>30 ans | 1,76 | 1,40-2,21 | 0,0000 |
≤30 ans | 1 | ||
Force de l’Ordre et de Sécurité | |||
Oui | 2,19 | 1,01-4,78 | 0,0481 |
Non | 1 | ||
Profession enseignante | |||
Oui | 2,39 | 1,58-3,63 | 0,0000 |
Non | 1 | ||
Sexe | |||
Masculin | 2,09 | 1,62-2,70 | 0,0000 |
Féminin | 1 | ||
Situation matrimoniale | |||
Célibataire | 1,7 | 1,41-2,02 | 0,0000 |
Marié | 1 | ||
Élève/Étudiant | |||
Oui | 1,49 | 1,19-1,87 | 0,0005 |
Non | 1 |
Tableau 2 : Facteurs associés aux hépatites virales B ou C chez les primo-donneurs de sang au CNTS Lomé de 2020 à 2022 (régression logistique).
Tableau 3 : Répartition des primo-donneurs positifs aux hépatites selon les professions au CNTS de Lomé de 2020 à 2022
Profession | Nombre de primo-donneurs | Nombre de cas d’hépatite (VHB+VHC) | Proportion (%) |
---|---|---|---|
Enseignants | 380 | 27 | 7,1 |
Employés de bureau | 1071 | 71 | 6,6 |
Force Ordre et de Sécurité | 123 | 7 | 5,6 |
Élèves | 4488 | 156 | 3,4 |
Professionnels de santé | 410 | 11 | 2,6 |
Artisans | 7301 | 144 | 1,9 |
Étudiants | 9348 | 163 | 1,7 |
Total | 19081 | 579 | 3 |
Tableau 3 : Répartition des primo-donneurs positifs aux hépatites selon les professions au CNTS de Lomé de 2020 à 2022